Historique de la Soka Gakkai
Josei Toda (1900-1958), éducateur et disciple de Tsunesaburo Makiguchi (1871-1944), fonda la Soka Gakkai avec ce dernier en 1930, et fut à l'origine de sa reconstruction après la Seconde Guerre mondiale. Il se dévoua à revitaliser l'esprit du bouddhisme à l'époque moderne et à poser les bases d'un mouvement populaire dédié à la paix.
Josei Toda naît le 11 février 1900 dans ce qui est connu actuellement comme la ville de Kaga, au Japon, et grandit dans le village d'Atsuta. Après de brillantes études, il commence une carrière d'éducateur.
En 1920, il rencontre Tsunesaburo Makiguchi, alors directeur d'une école primaire. Durant les vingt-trois années qui suivent, Josei Toda travaillera aux côtés de Makiguchi, qu'il considère comme son maître. Il l'aide à développer une nouvelle théorie éducative qui, en contraste avec les méthodes prévalentes à cette époque, place la priorité sur le bonheur des élèves. Les deux hommes s'efforcent avec passion de réformer le système éducatif japonais.
Création de la Soka Gakkai
Lorsque, en juin 1928, Makiguchi adopte la foi dans le bouddhisme de Nichiren, Josei Toda le rejoint tout naturellement. Le respect de la dignité de la vie, principe central du bouddhisme, devient dès lors le fondement de sa pensée et de ses actions, dans la continuité des valeurs humanistes qu'il avait toujours défendues.
La publication du Système pédagogique de la création de valeurs, le 18 novembre 1930, marque la fondation de la Soka Kyoiku Gakkai (Société pour la création de valeurs), une association dont le but est de promouvoir les théories éducatives humanistes de Makiguchi. C'est l'ancêtre de l'actuelle Soka Gakkai. En se développant, l'association élargit le champ de ses préoccupations, pour promouvoir une réforme religieuse et sociale à travers la pratique du bouddhisme de Nichiren.
Opposition à la guerre
Cependant, dans les années 30, le climat politique japonais se durcit alors que le pouvoir tombe dans le militarisme. L'invasion de la Mandchourie en 1931 marque le point de départ d'une guerre de quinze ans dont le théâtre d'opération va s'élargir à la Chine à partir de juillet 1937, et culminer avec l'entrée dans la Seconde Guerre mondiale en 1941. Cherchant à étendre son contrôle sur la religion, les autorités militaires voient dans la Soka Kyoiku Gakkai un obstacle à leurs visées guerrières et, en juin 1943, emprisonnent Tsunesaburo Makiguchi et Josei Toda, ainsi que les principaux responsables de l'organisation.
Une expérience mystique
Sans nouvelles de son mentor, Josei Toda entreprend dans sa cellule une quête du sens profond du Sûtra du Lotus, récitant de nombreux Nam-myoho-renge-kyo et étudiant intensivement le texte du Sûtra. Un jour qu'il médite profondément sur les « trente-quatre négations » du le Sûtra aux sens infinis (introduction du Sûtra du Lotus), qui décrit le Bouddha, il connaît alors une profonde expérience intérieure :
Le Bouddha est la vie elle-même ! C'est l'expression de la vie. Le Bouddha se trouve dans notre vie même. Mais il existe également à l'extérieur de notre vie. Il est l'immensité de la vie cosmique.
cité in D. Ikeda, La Sagesse du Sûtra du Lotus, chap. 2, Acep.
Puis, quelques jours plus tard, il a la sensation de se trouver parmi l'assemblée des bodhisattvas sortis de la terre, lors de la « Cérémonie dans les airs » décrite dans le Sûtra du Lotus et transcrite par Nichiren sous la forme du Gohonzon.
Cette expérience l'éveille à sa mission de transmettre largement le bouddhisme de Nichiren afin d'établir les fondations de la paix.
La reconstruction de la Soka Gakkai
Affaibli et en mauvaise santé, Josei Toda sort de prison le 3 juillet 1945, quelques jours avant la reddition du Japon, acte qui met fin à la Seconde Guerre mondiale dans le Pacifique. Son maître, Tsunesaburo Makiguchi, quant à lui, est décédé en prison, le 18 novembre 1944.
Dans un pays dévasté par la guerre, il décide de reconstruire l'association laïque du bouddhisme de Nichiren, qu'il renomme Soka Gakkai (Société pour la création des valeurs), et va commencer à dispenser des cours sur le Sûtra du Lotus et des orientations sur la façon de mettre les enseignements du bouddhisme en pratique. Il met en avant la notion de « révolution humaine », qui est une formulation moderne du principe de l'atteinte de la bouddhéité : la transformation profonde d'un individu peut amener un changement positif à grande échelle. Ce concept donne l'axe directeur de la pratique bouddhique au sein du mouvement Soka, jusqu'à aujourd'hui.
La formation d'un successeur
Le 14 août 1947, lors d'une réunion de discussion dans un quartier populaire de Tokyo, Josei Toda fait la rencontre de Daisaku Ikeda, un jeune homme de 19 ans venu écouter cet homme qui avait été emprisonné pour s'être opposé à la guerre. Daisaku Ikeda décide alors de prendre Josei Toda pour maître, de la même façon que ce dernier l'avait été vis-à-vis de Makiguchi. Ce lien de maître et disciple, fondamental en bouddhisme, est la force motrice permettant de « faire tourner la roue de la Loi », c'est-à-dire d'assurer la transmission de la Loi bouddhique.
Un développement inédit
Sous l'impulsion de Toda, un élan de transmission du bouddhisme de Nichiren se répand à travers tout le Japon, à une échelle sans précédent. Le mouvement populaire de la Soka Gakkai se développe, touchant la vie de milliers de personnes.
Après des années d'efforts pour redresser ses affaires, Josei Toda devient deuxième président de la Soka Gakkai, le 3 mai 1951. Mettant en avant le rôle des femmes et des jeunes, Toda va structurer le mouvement et lui donner une portée sociale et culturelle : festivals sportifs, donations de livres et d'instruments de musique, activités culturelles, etc. Dans l'esprit humaniste du bouddhisme de Nichiren, la Soka Gakkai crée un courant de personnes qui contribuent à la société dans tous les domaines.
Pourtant, avec son développement, l'organisation commence également à faire face à de violentes attaques et discriminations : la persécution des mineurs de Yubari ou l'affaire d'Osaka, par exemple. La détermination de Josei Toda ne s'en trouve que renforcée dans sa lutte pacifique pour la cause des personnes ordinaires et de la paix.
Legs à la jeunesse
Le 8 septembre 1957, au cours d'un grand rassemblement au stade Mitsuzawa, à Yokohama, il fait une déclaration historique en faveur de l'abolition des armes nucléaires.
Le 16 mars 1958, malgré sa santé déclinante, il participe à un grand rassemblement au pied du mont Fuji au cours duquel il confie à la jeunesse du mouvement la mission de réaliser kosen rufu - la paix mondiale à travers la large diffusion des valeurs humanistes du bouddhisme de Nichiren.
Le 2 avril 1958, après une vie consacrée au bonheur des personnes ordinaires, Josei Toda s'éteint paisiblement. A sa mort, la Soka Gakkai dépasse les 750 000 membres, objectif qu'il s'était fixé en prenant la tête du mouvement sept ans plus tôt.