L'illumination de Devadatta et de la fille du roi dragon
Devadatta était le fils aîné du roi Dronodana et le neveu du roi Shuddhodana. Il était ainsi le cousin du Bouddha Shakyamuni et également le frère aîné du vénérable Ananda. Sa position dans le Jambudvipa n'était donc en rien celle d'une personne de basse condition. Il devint disciple du moine Sudaya et entra dans la vie religieuse. Du vénérable Ananda il apprit la maîtrise des dix-huit pouvoirs surnaturels et il mémorisa les 60.000 enseignements non bouddhiques et les 80.000 enseignements bouddhiques. Il observait cinq pratiques et paraissait presque plus saint que le Bouddha lui-même. Désireux de prendre la place du Bouddha, il eut l'audace de commettre le crime de perturber le Sangha en fondant son propre sanctuaire sur le Mont Gayashirsha et en invitant les disciples du Bouddha à l'y rejoindre. Il confia au prince héritier Ajatashatru : "J'ai l'intention de tuer le Bouddha et de devenir le nouveau bouddha. Vous devriez tuer votre père le roi Bimbisara et régner à sa place ! "
Lorsque le prince héritier Ajatashatru eut bel et bien tué son père, Devadatta guetta les déplacements du Bouddha et avec une grosse pierre réussit à le blesser et à faire couler son sang. De plus, il battit à mort la nonne Utpalavarna qui était parvenue au stade d'arhat. Il commit ainsi trois des cinq forfaits.
De plus, avec Kokalika comme disciple et le roi Ajatashatru comme protecteur, Devadatta commença à attirer des disciples de partout, jusqu'à ce que, des cinq régions de l'Inde, de ses seize grands royaumes et de ses cinq cents principautés de taille moyenne, toute personne coupable d'une, de deux, ou de trois des cinq forfaits, sans exception, soit venue rejoindre sa communauté. Tous accoururent auprès de lui comme de multiples rivières se jettent dans le vaste océan, ou comme quantité de plantes et d'arbres prolifèrent sur une grande montagne. De même que les sages se rassemblaient autour de Shariputra, et ceux qui recherchaient les pouvoirs occultes, autour de Maudgalyayana, les personnes aux tendances mauvaises s'allièrent avec Devadatta.
Cela eut pour résultat que la terre immense, épaisse de 168.000 yojana et reposant sur un cercle de vent aussi dur qu'un diamant, s'ouvrit néanmoins, et que Devadatta tomba vivant dans la grande citadelle des souffrances incessantes. Son principal disciple, Kokalika, tomba également vivant en enfer, tout comme la femme brahmane Chinchamanavika, le roi Virudhaka et le moine Sunakshatra. [...] Tous les êtres d'un système de mondes majeur et de l'univers entier furent informés de leur sort et s'accordèrent pour dire que, même s'il s'écoulait autant de kalpa qu'il y a de grains de poussière sur la terre, Devadatta et ceux qui l'accompagnaient ne seraient jamais délivrés de l'enfer avici ; que, même s'il ne restait plus rien de la pierre dont l'usure complète indique la durée d'un kalpa, ils continueraient à souffrir dans la grande citadelle de l'enfer avici.
Comme sont donc stupéfiantes, dans le chapitre Daibadatta (XII) du Sutra du Lotus, la révélation, par le vénéré Shakya, fondateur de la doctrine, que Devadatta était son maître dans une existence passée et la prédiction qu'il atteindrait l'Éveil à l'avenir sous le nom du bouddha Roi-céleste ! [...] Si Devadatta, qui commit trois des cinq forfaits, et qui, de plus, se rendit coupable d'innombrables autres offenses, peut devenir le bouddha Roi-céleste, il ne fait aucun doute que les autres personnes mauvaises, qui ne commirent qu'un ou deux des Forfaits, atteindront également l'Éveil. (Le Daimoku du Sutra du Lotus - 1266 à une femme d'Amatsu)
Si moi, Nichiren, n'étais pas né dans ce pays, [le Japon, ] alors le Bouddha serait un grand menteur et quatre-vingt myriades de millions de nayuta de bodhisattvas auraient été coupables des mêmes crimes que Devadatta : avoir menti et égaré les autres.
[...] Ainsi, par exemple, le Bouddha injuria son disciple Devadatta en lui disant : "Tu n'es qu'un fou qui lèche le crachat des autres ! " Ce fut pour Devadatta comme si une flèche empoisonnée l'avait touché au coeur, et, furieux, il s'écria : "Gautama n'est pas un bouddha ! Je suis le fils aîné du roi Dronodana, le frère aîné d'Ananda et le cousin de Gautama. Même si j'avais commis une erreur quelconque, il devrait me la reprocher en privé. Mais m'accuser publiquement de fautes devant cette grande assemblée d'êtres humains et celestes est-ce bien l'attitude qui convient à un être parvenu à l'humanité suprême, ou à un bouddha ? Par le passé, il agit déjà comme mon ennemi en volant la femme que je voulais épouser, et il se conduit maintenant comme mon ennemi devant cette assemblée. A dater de ce jour, je fais voeu de le traiter comme mon pire ennemi, vie après vie, et pour l'éternité ! "
[...] Ainsi, par exemple, Devadatta lança sur lui un gros rocher, le roi Ajatashatru lâcha sur lui un éléphant sauvage, et pendant une période de quatre-vingt-dix jours le roi Ajita ne donna aucune nourriture [ni à lui ni à ses disciples], de sorte qu'ils en furent réduit à manger le fourrage des chevaux. Dans une ville brahmane, on lui fit une offrande de gruau de riz puant, et une femme brahmane du nom de Chinchamanavika, dissimula un récipient sous sa robe [en prétendant être enceinte de lui].
[...] Il est bien évident que les disciples du Bouddha, eux aussi, furent souvent contraints d'endurer des épreuves. Ainsi, de nombreux disciples de Shakyamuni furent tués par le roi Virudhaka, et des proches du Bouddha furent en très grand nombre piétinés à mort par des éléphants sauvages [lâchés sur eux]. La nonne Utpalavarna fut assassinée par Devadatta. (Traité pour ouvrir les yeux - Sado, février 1272 à Shijo Kingo)
La Fille du Roi Dragon ou l'atteinte de la boddhéité sans changer d'apparence
Le principe de l'atteinte immédiate de l'Éveil dépasse de beaucoup les principes énoncés dans les autres écrits ; et les affirmations révélant l'Éveil primordial du Bouddha et la durée illimitée de sa vie en tant que Bouddha ne se trouvent dans aucun autre enseignement. C'est ce qui permit à la fille du Roi-Dragon, âgée de huit ans, de sortir des profondeurs de la mer et de donner instantanément la preuve du pouvoir de ce Sutra. (Questions et réponses sur la pratique du Sutra du Lotus - Kamakura ? mars 1263 ? à Nichiji ? )
La fille du Roi-Dragon, âgée de huit ans, sans quitter son apparence reptilienne, obtint le fruit merveilleux de la bodhéité dans le royaume du Sud. Cela rend donc encore plus vraisemblable la possibilité, pour les femmes, nées dans le monde des humains, de l'obtenir aussi ! (Conversation entre un sage et un ignorant - 1265 ? à un samouraï? )
Bien que tous les êtres féminins soient ainsi décriés dans divers sutras, le bodhisattva Manjushri n'eut pas plutôt prononcé le seul caractère Myo qu'une femme devint instantanément bouddha. L'événement était si extraordinaire que le bodhisattva Prajnakuta (Chishaku), le meilleur disciple du bouddha Taho dans le monde du Trésor de Pureté, et Shariputra, considéré comme le plus sage des disciples du Bouddha Shakyamuni, protestèrent. Ils dirent que, d'après tous les sutras du Mahayana et du Hinayana enseignés par le Bouddha pendant plus de quarante ans, il était impossible que la fille du Roi-Dragon devienne bouddha. Mais en définitive leur argumentation fut vaine, car elle devint bel et bien bouddha.
[...] "Ni les maîtres ni les disciples n'ont besoin de passer par d'innombrables kalpas de pratique des austérités pour atteindre la bodhéité. Grâce au pouvoir du Sutra du Lotus, ils peuvent y parvenir sans changer d'apparence." Ainsi, il expliqua clairement pourquoi la fille du Roi-Dragon avait pu devenir bouddha. Il semble parfois difficile, pour les femmes de notre époque, d'atteindre la bodhéité sans changer d'apparence. Mais, si elles font confiance au Sutra du Lotus, il ne fait aucun doute qu'après leur mort elles renaîtront dans la Terre pure de la béatitude parfaite.
[...] La fille du Roi-Dragon fit un voeu en disant : "Je révélerai les enseignements du Mahayana et délivrerai les êtres de la souffrance." (Le Daimoku du Sutra du Lotus - 1266 à une femme d'Amatsu)
Dans les sutras du Mahayana autres que le Sutra du Lotus, il semblerait que les femmes puissent atteindre la bodhéité. Mais elles ne pourraient le faire qu'après avoir changé d'apparence. Il ne s'agit donc pas de l'atteinte immédiate de la bodhéité qu'implique le principe d'ichinen sanzen. C'est une possibilité théorique, non concrétisée. La fille du Roi-Dragon est, comme le dit le texte, "un exemple qui vaut pour toutes les autres." La fille du Roi-Dragon, en devenant bouddha, rendit possible l'atteinte de la bodhéité par toutes les femmes aux époques ultérieures. (Traité pour ouvrir les yeux - Sado, février 1272 à Shijo Kingo)
Quand le Sutra dit: La fille du Roi-Dragon... atteignit la bodhéité, il indique que le monde de l'animalité comporte les dix monde-états. (Le véritable objet de vénération - Sado, avril 1273 à Toki Jonin)
Celui qui reconnaît le pouvoir du Sutra du Lotus a devant les yeux la jeunesse éternelle et l'immortalité. Ma seule crainte est que votre fille meurt jeune, et c'est pourquoi je prie de toutes mes forces les divinités de la protéger. Elevez-la pour qu'elle soit comme Vimaladatta* ou la fille du Roi-Dragon. (Réponse à Kyo'o - Sado, août 1273, à Kyo'o, fille de Shijo Kingo)
De plus, une preuve tangible de l'essence est donnée par l'exemple des trois sortes de bouddha décrits dans le chapitre Hoto (XI), par les bodhisattvas Surgis-de-Terre et par l'atteinte de la bodhéité sans changer d'apparence de la fille du Roi-Dragon. Pourquoi les bodhisattvas Surgis-de-Terre en offrent-ils une preuve concrète ? (L'ainsité du Dharma Merveilleux - Sado, 1273 ? à Sairen-bo)
Les autres sutras ne promettent même pas un aussi grand bienfait au premier, deuxième, au troisième ou dixième auditeur, par conséquent moins encore au cinquantième. Ils ne mentionnent même pas le passé de ichi ni jintengo. Par conséquent, ils ne peuvent rien dire d'un passé encore plus lointain comme gohyaku jintengo ou sanzen jintengo. Seul le Sutra du Lotus promet la bodhéité aux personnes des deux véhicules et permet à la fille du Roi-Dragon de devenir bouddha sans changer d'apparence. (Enseignement, pratique et preuve - Minobu, 1274 ? à Sammi-bo)